Des surprises causent un retard dans les pousuites menées contre l'Agence tunisienne d'Internet
05/11/2008
De nouveaux développements ont obligé un Tribunal de Tunis à suspendre les audiences dans l'affaire de censure soulevée par le journaliste Ziad El Heni contre l'Agence tunisienne d'Internet.
Par Jamel Arfaoui pour Magharebia à Tunis – 05/11/08
[File] De nombreux bloggeurs tunisiens ont surnommé le 4 novembre "Journée nationale pour la liberté de blogger", en soutien à une affaire de censure initiée par le journaliste Ziad El Heni. |
Après seulement une journée, les audiences ont été suspendues dans l'affaire judiciaire de censure initiée par le journaliste et bloggeur Ziad El Heni contre l'Agence tunisienne d'Internet (ATI). Cette suspension est dûe à des développements récents susceptibles de modifier la nature du procès.
La troisième Cour correctionnelle du district de Tunis a annoncé, mardi 4 novembre, la décision de cette suspension, après que l'Union tunisienne des Radios Libres et que l'Observatoire des Libertés et des droits Unionistes aient rejoint El Hani dans cette poursuite judiciaire et qu'ils aient appellé le Président Zine El Abidine Ben Ali à témoigner.
Les audiences devraient reprendre le 18 novembre.
"Appeler le Chef de l'Etat à témoigner dans cette affaire est tout à fait conforme à la loi", a dit El Heni à Magharebia, à la suite de cette décision.
"Il a pu voir lui-même de quelle manière le site de Facebook a été bloqué, et il a donné l'ordre d'en rétablir l'accès", continue-t-il."En conséquence, son témoignage sera décisif, en révélant l'identité de celui qui avait ordonné l'interdiction du site, et de celui qui l'a effectivement interdit. Et nous pourrons alors tenir ces personnes pour responsables".
De nombreux utilisateurs Internet avaient été surpris, le 18 août, par le blocage du site de réseau social et populaire Facebook par le Gouvernement, interdiction qui avait été suspendue le 2 septembre sur la requête de Ben Ali.
Les experts en droit sont peu disposés à commenter cet appel au témoignage présidentiel. Le juriste Lazhar Akremidit à Magharebia : "Il est sage et rationnel d'ignorer simplement ce fait, parce qu'il n'est absolument pas sérieux".
Kamel Ben Younes, Président de l'Union Nationale du Comité des Libertés des Journalistes Tunisiens, a envoyé un message direct à El Heni qui critique cette initiative.
"Je pense qu'émettre des messages si provocants, si sensationnels, qui attaquent les symboles de l'Etat n'aide ni la liberté d'expression, ni les blogs", dit-il. "Au contraire, l'effet pourrait se révéler complètement inverse...[Ce] n'est que la réalisation de batailles personnelles et le témoignage d'un héroïsme imaginaire, avec à l'origine des pseudo-journalistes et des pseudo-activistes des Droits de l'Homme".
Selon Ben Younes, le rôle du syndicat n'est pas de poursuivre des objectifs personnels mais d'améliorer les conditions de la profession et la liberté de pensée et d'expression, dans les limites imposées par la loi.
Selon El Heni, sa poursuite judiciaire menée contre l' ATI a remporté le soutien de 653 bloggeurs, qui ont dénommé le 4 novembre "Journée Nationale pour la liberté de blogger" et qui ont créé un site Internet particulier en faveur de cette cause.
Le Bloggeur Moiz Ben Gharbia a dessiné un logo et Asdrubal a tourné une vidéo pour promouvoir cette campagne. Autre montage réalisé par ce dernier, une vidéo montrant comment il est possible de créer des blogs alternatifs permettant d'éviter les interdictions officielles.
Au cours des dernières semaines, le blog de Ziad El Heni avait été par intermittence indisponible aux lecteurs. "Mon blog a été bloqué après que j'ai publié le classement mondial de la liberté de la presse établi par reporters Sans Frontières", dit-il.
"J'ai du créer un site alternatif. J'ai décidé de répondre au défi de la censure électronique par un défi qui m'était propre ; je ne les poursuivrai pas en justice, mais je réouvrirai le site quand on le bloque. Jusqu'à maintenant, les censeurs ont bloqué mon site deux fois et je suis parvenu à le réouvrir. C'est une bataille qui vise à établir les droits des citoyens, et à laquelle je me rends armé des valeurs de la République et de la loi", conclut El Heni.
La semaine dernière, un responsable tunisien anonyme a déclaré à Reuters que le Gouvernement ne met pas de limites à la liberté d'opinion et d'expression. "L'Etat a franchi des étapes pour stimuler le pluralisme politique et médiatique, et pour élargir la liberté de la presse", dit cette source, citant la "publication et la distribution des journaux des partis d'opposition, ainsi que le soutien financier que ces derniers reçoivent de l'Etat, sans restrictions sur leurs opinions ou leurs positions".
L'officiel dit que le Gouvernement établit toutefois une limite : [l']exploitation d'Internet en tant qu'incitation à l'extrémisme, au terrorisme et aux pratiques immorales constitue une violation de la loi du pays et ne fait pas partie de la liberté d'expression".
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